Résumé
La popularité de la plateforme TikTok a connu une ascension fulgurante ces dernières années, se distinguant des autres réseaux sociaux par ses défis, ses danses et lip-synch, initiés et amplifiés par ses utilisateur·trices. Cette dynamique attire, inspire et suscite l’imitation, mais elle s’accompagne aussi d’un risque accru d’exposition involontaire à des contenus problématiques, notamment des discours extrémistes ou sexistes.
Cette présentation examinera la manière dont sont fabriqués, diffusés et appropriés sur TikTok les discours dénigrants les femmes et les personnes non-binaires, valorisant la domination et le contrôle masculin, souvent associés à une communication toxique. Plus précisément, nous nous intéresserons au mouvement « sigma male ». En adoptant une méthode qualitative d’observation numérique, fondée sur une immersion dans l’environnement TikTok, nous analyserons un corpus de vidéos, hashtags et comptes promouvant cette communication toxique, ainsi qu’une désinformation genrée.
Nous adopterons une approche socio-technique, considérant la promotion des discours masculinistes et diffamatoires à l’égard des femmes et des populations non-binaires comme une médiation entre la technologie et les interactions humaines. Alors que la plupart des recherches se concentrent sur les formes extrêmes du masculinisme, telle que le phénomène des incels, notre étude portera sur des contenus plus subtils, mais tout aussi pernicieux, qui façonnent progressivement une communication toxique, exposant les jeunes publics à un discours extrémiste envers les femmes et les catégories non-binaires. Les résultats de cette analyse sont d’autant plus inquiétants au regard de la large utilisation de TikTok, notamment par les adolescent·es, et du risque qu’ils courent d’être exposés à une désinformation sexiste.
Objectifs
- Sensibiliser l’auditoire à la diversité et l’ampleur des discours dits « masculinistes » sur les réseaux sociaux.
- Présenter un cadre d’appréhension et de compréhension des discours sexistes par le concept de communication toxique.
- Dresser un portrait large des usages numériques du jeune public sur les médias sociaux.
- Comprendre l’impact d’une plateforme comme TikTok sur la fabrique, la diffusion et l’amplitude des discours masculinistes dans la sphère publique.
Conférencier
Samuel Tanner est directeur et professeur titulaire à l’École de criminologie de l’Université de Montréal. Il est également chercheur régulier au Centre international de criminologie comparée (CICC) et chercheur membre de l’Observatoire international sur les impacts sociaux de l’IA et des technologies numériques (OBVIA). Il a créé le Laboratoire de recherche sur la technologie, l’activisme et la sécurité (LarTAS.org).
Ses travaux portent sur l’impact et le rôle des technologies numériques sur l’activisme contemporain, principalement de la droite radicale et des mouvements de protestation (notamment en ce qui concerne les mesures sanitaires), la désinformation auprès du jeune public (financé par le FRQSC) et a également travaillé sur l’impact des technologies sur les professions de la sécurité, en particulier la police.